Lorsque j’étais petite, mes grands-parents possédaient une maison à Cauterets dans les Pyrénées. Nous y passions au moins un mois chaque été, un mois où tout n’était que bonheur. Le bonheur d’atteindre enfin le village, groggy, après huit heures de voiture. Le bonheur d’aller pique-niquer à la Fruitière, de tremper ses pieds dans les eaux glacées du Gave et de cueillir des myrtilles au beau milieu des vaches. Le bonheur de randonner sur les épaules de mon papa au lac Bleu ou au lac de Gaube où nous prenions ce télésiège dont les banquettes en bois nous plantaient des échardes dans les fesses. Le bonheur de s’arrêter dans le magasin de souvenirs de la Raillère où un inépuisable nounours automate pédalait avec enthousiasme. Le bonheur de descendre à pieds au village pour faire une partie de billard-japonais, de mini-golf ; ou pour aller au cinéma et à la piscine (abstraction faite de cette maître-nageuse sadique qui, pour m’apprendre à nager, m’avait scotché les doigts pour ne plus que je les écarte !). La maison baptisée “La Frênaie” porte toujours sur sa façade la plaque en bois pyrogravée par une amie de la famille. Nous y faisions les quatre-cents coups avec les cousins, les copains, les voisins… Il y avait l’odeur du feu dans la cheminée, celle de la mousse détrempée sur le mur de la coursive menant au garage ; le goût des gâteaux à la broche et des tartes aux myrtilles tout juste sorties du four ; le bruit des hirondelles qui nidifiaient sous l’appentis, du grincement de la porte d’entrée ; et la vue, cette vue imprenable qui embrasse le village, les montagnes et qui prenait aux tripes dès que l’on ouvrait les volets du dortoir. Aujourd’hui La Frênaie est devenue une “résidence locative” dans laquelle s’entassent une dizaine d’appartements, mes grands-parents ne sont plus et mon enfance est tellement lointaine qu’il me semble depuis avoir vécu plusieurs vies. Pour autant la maison et mes tendres souvenirs sont toujours là, le miracle de Cauterets sans doute.
B comme Baccalauréat <– –> D comme Dentiste
